mardi, novembre 11, 2008

risque d'opinion

Nous sommes dans une société de sécurité.
Il faut savoir ce que cela veut dire.

Cela veut dire que notre gouvernement ne s'assigne pas de limites quand il s'agit de prévenir les risques qui pèsent sur les citoyens ... et que pour identifier un risque il ne lésine pas sur les deniers publics.

La preuve ?

Hé bien le Ministère de l'Éducation nationale lance un appel d'offre pour un marché consistant à veiller sur les médias de façon à prévenir un "risque opinion"

"Les informations signifiantes pertinentes sont celles qui préfigurent un débat, un « risque opinion » potentiel, une crise ou tout temps fort à venir dans lesquels les ministères se trouveraient impliqués. "

Oui, vous avez bien lu :
Un débat devient "un risque opinion".

Rappelons : le débat appartient à l'essence de la démocratie.

Reprenons les termes de la situation :

En 2008, donc, en France, pays revendiqué démocratique, premier énonciateur des Droits de l'homme, et se présentant à ce titre comme modèle, le Ministère de l'Éducation nationale, c'est-à-dire cet organe de l'État chargé d'organiser l'éducation du citoyen, engage l'argent public pour, entre autres «Décrypter les sources des débats et leurs modes de propagation» [décrypter = identifier, dénoncer] pour «Alerter et préconiser en conséquence».

  • 1er enseignement: on peut faire l'hypothèse que le ministre se prépare à prendre des décisions qui vont faire débat, et qui pourraient ne pas supporter le débat. Mauvaises décisions alors ? Non ! On engage l'argent public pour supprimer le débat.
  • 2ème enseignement: s'il y a un "risque opinion", contre lequel on est engagé dans une politique de prévention, voilà ce que cela veut dire:
    - tous les lieux de débats deviennent des lieux à risque.
    - des pans entiers de l'éducation nationale deviennent risqués : les cours de sciences sociales, d'histoire, de lettres deviennent tout particulièrement des lieux à risques ; il faut supprimer toutes affaires cessantes la philosophie.
    - préparons-nous – c'est exactement le sens de la démarche – à ce que certains d'entre nous soient contactés par l'entreprise qui emportera le marché pour être rémunérés afin de rendre compte de ce qui se dit dans le milieu des profs.

  • 3ème enseignement: si lesdits citoyens ont élu des individus qui utilisent le pouvoir ainsi obtenu pour nier la démocratie, alors cela prouve que la démocratie n'existe pas.
    La démocratie – le fondement du pouvoir d'État dans la volonté du peuple – est à conquérir.
Dans cette perspective, je propose qu'on se tienne au courant sur l'entreprise bénéficiaire du marché et qu'on lui offre gratuitement des informations : que nous l'abreuvions de revendications de «sources des débats», en lui envoyant textes et autres interventions.

Signé : Une des 60 millions de sources des débats !

jeudi, novembre 06, 2008

Obama – No drama

Qu'est-ce qu'un drame ?
C'est une séquence de vie où l'action est entrainée par les passions, et plus ou moins perdue pour le contrôle par la raison.
Hé bien : je me félicite de ce beau slogan : "Obama – No drama"

Pourquoi ?
Parce que c'est le meilleur slogan pour prendre la politique au sérieux !
Constatons ensemble l'envahissement de notre environnement par les expressions journalistiques dramatisantes.
Par exemple les bavassages sur le thème : "Le premier noir à la maison blanche ! "
Car cette mise en scène de l'élection d'un noir (ce qui est faux), cristallise les passions sur l'image d'une personne, déclenchant ainsi les fantasmes de chacun.
Le résultat : des obstacles émotionnels à ce qui pourrait permettre aux gens (au peuple !) de se réunir sur un projet politique – l'usage raisonné du langage sur la bonne manière de vivre ensemble.

"No drama", c'est-à-dire pas de dramatisation , pas de cet usage incessant du système images/passions par lequel le pouvoir, au moyen des média, accapare la disponibilité-à-l'écoute-des besoins-sociaux des cerveaux de chacun.

La vraie question qu'induit cette élection Obama serait donc :
Obama restera-t-il "no drama" avec, entre les mains, les instruments du pouvoir ?

dimanche, novembre 02, 2008

Le hochet Obama

La proposition que l'on entend partout dans les médias :
"Obama, premier président noir"
Qu'aujourd'hui, elle soit encore sur le mode hypothétique, qu'elle devienne catégorique dans deux jours, il n'empêche que la proposition est sans cesse déclinée jusqu'à en avoir la nausée.

D'abord, elle est contestable. Qu'est-ce qu'être noir ?

Couleur de peau ? Alors, c'est faux.
Ascendance d'esclaves ? C'est faux.
Avoir du sang venant d'Afrique ? C'est certain, mais alors qui peut assurer qu'il n'est pas noir, considérant tous les métissages de l'aventure humaine ?

Donc quel est le sens de cette insistance ?
L'important ne serait-il pas d'expliquer ce qu'Obama veut faire du pouvoir qu'il convoite ? Or, on nous en dit si peu ! On s'y intéresse si peu !

Peut-être l'adjectif "noir" à accoler au nom d'Obama prend-il une telle valeur parce qu'il satisfait des passions convergentes :
  • Passion de ressentiment de tous les laissés-pour-compte de la brutalité du monde technico-économique contemporain qui semble effectivement promu par des humains à peau claire. Qui dit ressentiment dit désir de rabaissement de qui réussit mieux que soi. Dans cette perspective le pouvoir d'Obama vaudrait d'abord symboliquement comme le fait que le "blanc" soit sorti de la Maison "Blanche".
  • Passion de pouvoir de ceux qui sont aux manettes trop heureux de donner ce dérivatif à un peuple destiné à être victime prioritaire de la crise, en ayant un peu conscience, et devenant de plus en plus grondeur. Donc le discours "Obama, premier président noir" s'expliciterait ainsi : "Voyez braves gens, vous avez votre revanche, c'est un noir qui est l'homme le plus puissant de la Terre. Vous avez en quelque sorte gagné. Alors rentrez chez vous ! Bavez devant les récits arrangés et anecdotiques de sa présidence que nous allons vous servir en abondance ! Et fermez-là !"
Bref, il s'agit de cout-circuiter le sentiment d'injustice qui ne peut que s'imposer au vu de la situation sociale, en flattant un sentiment socialement beaucoup plus dangereux – le ressentiment du dominé contre le dominant.

Définitions :
  • sentiment d'injustice : sentiment que la société n'est pas organisée dans le sens de la reconnaissance d'une égale dignité de tous ses membres. Il est une exigence de dignité pour tous.
  • ressentiment : sentiment qui pousse à vouloir réduire le pouvoir du dominant faute de pouvoir affirmer le sien.
Obama président :
  • au niveau de l'action je n'ai pas trop d'éléments pour savoir ce que cela sera,
  • au niveau de la communication, il semble bien que ce soit déjà le hochet balancé au peuple pour qu'il le secoue tant et plus afin qu'il oublie sa revendication de justice à l'intérieur de la société en laquelle il vit ... à condition qu'Obama soit noir.

samedi, octobre 25, 2008

Le blues du responsable de l'avenir de l'humanité.

Ne trouvez-vous pas que c'est un peu lourd tout ça ?
Je veux dire ces phrases édifiantes qui sont balancées sans arrêt en accompagnement des diverses expressions de la prise de conscience de la crise écologique.
"Ne jette pas ton plastique, pense à l'avenir de la planète",
"Tu ne devrais pas utiliser ces piles, ça pollue, pense à l'avenir de l'humanité",
etc.
Mais, saperlipopette, c'est bien la première fois dans l'histoire qu'on enjoint à quiconque d'être "responsable de l'avenir de l'humanité" !
Comme maximisation de la responsabilité on ne peut pas faire mieux !
Ne trouvez-vous pas que ça fait un peu beaucoup pour un apprentissage de la responsabilité quand il s'agit des jeunes générations ?
Grands dieux, ils n'ont pas choisi d'arriver dans un monde où on leur propose toutes ces saloperies.
Être responsable c'est être en capacité de répondre des conséquences ses choix. Être responsable de l'humanité c'est être en capacité de répondre des conséquences pour l'humanité de ses choix.

N'y a-t-il pas une certaine disproportion entre le choix d'un emballage non biodégradable et la conséquence dont on serait censé répondre ?
D'autant plus que c'est un choix qui est souvent assez théorique, puisque l'on met le plus souvent les gens en conditions aussi bien matérielles que psychologiques, d'être induits à faire ces choix.

Par contre ceux qui font les choix qui ont une réelle conséquence pour l'avenir de l'humanité, n'ont pas du tout l'air chargés de cette responsabilité – choisir le camion contre le rail dans les années 70 – ou, à la même époque, l'hyper-commerce contre le commerce de proximité.
Ceux qui ont vraiment le choix parce qu'ils ont le pouvoir, et que ce pouvoir a un impact social et écologique sensible à un niveau global, pourquoi ne parlent-ils pas de leurs responsabilités concernant l'avenir de l'humanité ?

L'inégalité irait-elle jusque-là ? Inégalité face à la loi, certes, nous en découvrons l'ampleur aujourd'hui où l'on s'intéresse aux paradis fiscaux ; mais inégalité dans le sentiment de responsabilité aussi,
ce qui est bien plus grave pour le devenir collectif.

dimanche, octobre 19, 2008

Accident collatéral de la Crise : La logique des caisses-qui-sont-vides heurtée de plein fouet par la logique des produits-dérivés

On n'en revient pas. On est perplexe. Une crise financière qui peut se résoudre en sortant des milliards d'euros, de dollars ? D'où ? D'un chapeau ?...
On est devant un spectacle de magie, yeux rond, bouche bée, interloqués par la force des questions qui se pressent : mais comment vous faîtes ? D'où ça vient ? Qui paie ? Tout cet argent, c'est bien pour notre intérêt ?
On nous répond ... enfin un peu : argent virtuel, ... enfin ... prêté, ... avec des intérêts, ... seulement si nécessaire, ...sera emprunté, ... jeu d'écriture, ... l'État y gagnera, etc.

Eh bien, je suis, nous sommes, nous, l'immense club des interloqués. Ceux qui avaient appris à penser l'économique d'après la paradigme du "contenant-vide-ou-plein". C'est en effet le discours de solide bon sens que l'on a toujours reçu des gestionnaires de l'argent public – ou de nos salaires – lorsque nous nous posions un problème économique : « les caisses sont vides !»(et oui, la thèse opposée, logiquement possible, est rare) . Et nous pensions bêtement que pour posséder une richesse, il fallait qu'elle existe au préalable quelque part.

Et non, nous sommes des imbéciles. On nous servait le discours pour imbéciles. La réalité des finances est bien plus subtile : pas besoin qu'une richesse existe pour l'imputer au crédit d'un bilan.
L'économie capitaliste s'est développée en créant du symbole de possession de richesse (de la monnaie) sur la richesse à venir attendue : voir l'argent-dette.
Et ces fameux produits financiers dérivés, si mystérieux, ne sont que le produit de cette virtualisation de la richesse à un niveau supérieur : voir mon post du 22/09 ci-dessous :Titrisation médiatique.

Vous l'avez compris : nous étions complètement en dehors du coup. Dans les discours sur le rempli ou non des caisses, le caractère virtuel, et même virtuel-puissance-x, de la richesse, nous avait échappé. Nous croyions bêtement que la monnaie n'était que le symbole d'une richesse existante. Et bêtement nous revendiquions : « non, les caisses ne sont pas vides !» comme si c'était un problème. On a dû bien les faire rigoler.

Eux – nous. Il y a peut-être bien deux classes sociales – et il faudrait s'en retourner vers le vieux Marx – dont les deux langages économiques seraient la ligne de démarcation. Le langage de subtilité de ceux qui savent que toute richesse fiduciaire est crédit, et le langage simpliste qui pense que la richesse est dans les biens utilisables dont la monnaie n'est que le symbole.
Il resterait à décrire (Marx encore, mais la théorie de la plus-value ne sera-t-elle pas trop limitée ?) le tour de passe-passe par lequel le premier groupe siphonne la richesse (non virtuelle) produite par l'autre.

Il reste que la crise des représentations de l'économie est réelle pour l'immense majorité. Et, n'est-ce pas, la perplexité et l'étonnement sont toujours salutaires : ils amènent à réfléchir.
Platon : « C'est la vraie marque d'un philosophe que l'étonnement que tu éprouves »

Parle-moi fric, je te dirai d'où tu es.

dimanche, septembre 28, 2008

Ça va pas la tête !

Oui, ça va pas la tête !
Sans point d'interrogation.
C'est un diagnostic.
Sur l'esprit d'incohérence dont le monde – et "Le Monde" quotidien du soir – a besoin pour continuer à tourner sans remettre en cause les positions acquises.
Ainsi l'on peut lire dans la même journée du 26 un article sur
Les émissions de CO2 excèdent largement les prévisions

et un article sur
Formule 1 : course de nuit à Singapour

Et pas de rapport entre ces deux articles !

Le premier est un message d'alerte maximum : il fait le constat de l'inconséquence des décideurs, et nous met en face de la détermination délibérée de catastrophes à venir ( + de CO2 => + d'effet de serre => réchauffement accru);
le second n'examine, concernant une course automobile en nocturne, que les problèmes posés à une poignée de pilotes automobiles.
L'alarme de l'un ne parvient pas aux oreilles de l'autre !

N'y a-t-il pas une instance de coordination, quelque chose comme une rédaction en chef, pour rappeler que le lecteur des articles est Un, et que c'est dans un même cerveau que ces deux articles doivent cohabiter ?

Les journalistes auraient-ils une idée trop réductrice de leur lectorat pour l'imaginer affidé à un domaine d'intérêt particulier avec ses modèles, voire sa vision du monde, sans capacité d'aller au-delà ?

Où alors ne sommes-nous en face d'une maladie spirituelle contemporaine, qu'on a pu appeler "zapping", et qui implique que l'on vide la mémoire vive de son cerveau à chaque clic de souris (ou annonce d'une nouvelle communication) pour se rendre disponible à la séduction nouvelle ?

Serait-ce de cette maladie que l'humanité se dépérit ?

lundi, septembre 22, 2008

Titrisation médiatique

La tempête financière actuelle m'a initié au mot titrisation.
On titrise une créance lorsqu'on la met sur le marché où elle devient un titre autonome sur lequel on peut spéculer. Ce n'est plus alors la solvabilité d'un débiteur qui détermine la valeur de la créance, mais ce qu'on pourrait appeler l'"ambiance" des marchés. On fait crédit à un établissement bancaire de ses crédits. On fait crédit à un fond d'investissement du crédit qu'il a fait à des établissements de crédit, etc...

Éh bien il faudrait peut-être retenir ce mot de titrisation comme une des clés du monde contemporain.

N'y a-t-il pas, de manière très sensible, une titrisation médiatique ?
Par exemple on vient juste, à la radio, de m'informer – me vanter – sur une émission de télévision ce soir sur la médiatisation de la vie privée des hommes politiques.
N'est-ce pas me demander de faire crédit sur le crédit que je dois porter à une émission qui va porter sur le crédit qu'on doit accorder au médias qui parlent de la vie privée des hommes politiques.
Vous suivez ?
Vous ne suivez pas ? C'est normal.
Car l'essence de la titrisation, n'est-ce pas justement de décoller de la réalité – l'unique, celle qui résiste à nos désirs – pour s'attacher aux représentations, et aux représentations de représentations, etc...?
Comme les sophistes de l'antiquité qui proclamaient qu'il n'y a pas de réalité unique, mais qu'il n'y a que les représentations qu'on s'en fait. Et donc que l'important, c'est d'imposer les siennes.
Perdre la réalité par le jeu sur les représentations qu'on s'en fait, cela a toujours été une manière de faire illusion, donc une méthode de pouvoir.
Pendant ce temps, des gens n'arrivent pas à se nourrir, des camions piégés explosent, et la banquise se délite.
La titrisation : dernier avatar de la sophistique.
"Socrate ! Reviens ! On a besoin de toi !"

lundi, septembre 15, 2008

Répulsif anti-jeunes

Donc il s'est trouvé de doctes gens, consciencieux, méthodiques et biens payés, pour consacrer leurs journées, plusieurs, beaucoup sans doute, à mettre au point un répulsif anti-jeunes. Que faisaient-ils avant ? Que font-ils maintenant ? Du répulsif anti-mammifères pour les jardins, de la lotion anti-moustiques ? N'auraient-ils donc que modifié leurs paramètres pour trouver le produit qui agresse le mieux la sensibilité des jeunes ?
Et puis une entreprise toute fière de son innovation l'a lancée sur le marché. Et il s'en est vendu plusieurs milliers d'exemplaires (ce sont des boîtiers émetteurs d'ultrasons).
Je remarque parallèlement la multiplication d'affichettes interdisant l'expression de la vitalité des jeunes dans les ensembles urbains.
Donc résumons-nous : en ce début de XXI° siècle les jeunes sont séparés de l'expérience des activités adultes – expérience si formatrice pour eux . Ils sont exclus de presque toutes les voies de circulation (par les bagnoles). Ils sont drastiquement confinés dans les espaces publics (par les bagnoles et les exigences du commerce). Et lorsqu'ils sortent de chez eux pour aller vers la socialisation la plus proche– les bas d'immeuble – ils sont chassés par des répulsifs.
Voulez-vous faire de vos enfants de futurs citoyens libres capables de participer activement à l'élaboration du monde commun ? Ou voulez-vous en faire des bêtes furieuses prêtes à se livrer corps et âmes aux plus folles aventures terroristes ?
Ah ! J'étais injuste. J'oubliais que, dans votre grande sollicitude, vous avez prévu des jeux où ils peuvent exprimer toute leur agressivité par d'infimes mouvements du pouce et de l'index, sans sortir de leur chambre.
Dis-moi comment tu traites la jeune génération, je te dirai où tu vas.

Grotesque

Plus de 100 000 personnes à Lourdes. Pour marquer le 150 ème anniversaire de l'hallucination d'une ado. C'est grotesque !

dimanche, août 24, 2008

Sarkozy et la retraite

C'est lorsqu'il a annoncé qu'il allait, sitôt élu Président de la République Française, partir quelque part, dans un endroit isolé - « comme pour une retraite», le temps qu'il lui faudrait « pour habiter la fonction » (Sarkozy cité dans Le Monde du 27.04.07), que j'aurais dû commencer à m'inquiéter pour l'avenir de notre communauté nationale.

Il est vrai que j'avais été très étonné. Il était le premier à faire ce type d'annonce. Une annonce qui recelait l'aveu que son auteur ne se sentait pas trop dans l'éminente fonction sociale qu'il briguait.

16 mois plus tard, force est d'admettre – les occurrences pullulent – que Sarkozy n'est toujours pas en mesure d'« habiter la fonction ».

Il est toujours dans ses vieux habits. Ceux par lesquels il s'est montré performant pour capter l'intérêt et l'adhésion immédiate de l'opinion.

Mais d'un Président de la République on attend justement l'opposé d'un comportement qui engendre des sensations positives immédiates (que ce soit un bon mot ou une pommade qui apaise une émotion collective ponctuelle.) On attend des repères et des fondations pour l'avenir.

L'opinion en a conscience. Et donc lui-même aussi. C'est pour cela qu'il met régulièrement en scène le "j'ai changé". C'était le cas en janvier 2007, en avril 2007, entre les deux tours (cf l'article du Monde cité ci-dessus), en janvier 2008 aussi. Mais comment faire accroire ce changement si la partition du "j'ai changé" se répète ainsi ? Elle n'est alors rien d'autre qu'une réponse à effet immédiat à un désaveu de l'opinion. Toujours les vieux habits...

Le héraut de la réforme serait-il ainsi incapable de se réformer lui-même ?

On en arriverait à craindre un manque d'étoffe, d'épaisseur spirituelle chez le 1er personnage de l'État. Rappelons qu'il a été capable de dire publiquement : « Il faut qu'il y ait de l'autorité, des lois. L'intérêt de la règle, de la limite, de la norme, c'est justement qu'elles permettent la transgression. Sans règles, pas de transgression. Donc pas de liberté. Car la liberté, c'est de transgresser.» Interview par M. Onfray dans Philosophie Magazine n° 8. Et il a dit ça lors de sa campagne pour se faire élire chef de l'État ! C'est tout simplement disqualificatoire : l'État, c'est justement le système des règles qui rendent viables la vie en commun ! C'est de la philosophie d'adolescent ou de soixante-huitard attardé et superficiel. Les policiers, les magistrats, chargés d'affirmer l'autorité de l'État face au délinquant vont-ils se voir opposer une citation de Sarkozy ?

Nous ne savons pas ce qui se passe en l'esprit d'un être humain. Mais celui dont il s'agit ici s'est mis sur le tout devant de la scène, et nous souffrons de recevoir de lui des signes qui ne sont pas à la hauteur de la confiance que, de nous, il a revendiquée.

Et l'exigence de l'intérêt collectif est trop prioritaire pour souffrir de l'attente d'une clarification de la psychologie présidentielle.

Dès lors la nécessité d'une retraite pourrait à nouveau se poser au Président, mais sans doute pas selon la même modalité.

samedi, août 23, 2008

Jeannie Longo hors cadre

Vous connaissez Jeannie Longo : la plus grande de tous nos sportives et sportifs (déjà pour le plus voyant, c'est-à-dire pour le palmarès).
Jeannie Longo vient de participer à ses 7èmes J.O. (ses 1ers : en 1984 à Los Angelès) !
Elle a frôlé l'obtention d'une médaille, à 49 ans !
Sa première médaille ? En 1979, comme championne de France !

Qui dit mieux ? Quels autres sportifs, même s'ils font délirer les commentateurs et les foules peuvent-ils lui être comparés ?

Avez-vous vu des images de J. Longo à la télé lors de ces J.O. ? Moi, pas !

Quel grandiose discrétion des médias !

Qu'est-ce qui ne va pas chez J. Longo pour que les journalistes sportifs n'aient pas la propension à écouler leurs adjectifs dithyrambiques ?

C'est parce qu'elle mange bio et défend l'agriculture bio au lieu de jouer dans les marges de la médecine allopathique et du dopage?

C'est parce qu'elle travaille, s'entraîne en dehors du cadre de la fédération sportive ?

C'est parce qu'elle fait des affaires commerciales, qu'elle est virtuose de piano, entre autres activités ?

Ou bien est-ce parce qu'il est dans la logique de notre société du spectacle que celui-ci soit éphémère et que l'athlète durable ne soit pas spectaculaire ?

Eh bien je vois une autre possibilité : peut-être que Jeannie s'en moque de la reconnaissance dithyrambiques et baveuse de journalistes sportifs toujours à nager dans les clichés et le chauvinisme.

Elle n'en n'a pas besoin.

Nous non plus. Il nous suffit de savoir qu'elle existe. Alors nous nous intéressons à elle. C'est comme cela qu'elle a le plus d'influence : comme personnalité exemplaire !

Reprise ?

Tenir un blog, c'est-à-dire tenir une rubrique régulière, est une discipline à laquelle je n'ai pas su me contraindre.

Humain, trop humain que ce divorce entre ce qui est voulu et ce qui est tenu. Ici, vous l'avez remarqué, on veut et tient ( + ou -) pendant les vacances d'été, et on laisse filer lorsque la pression professionnelle devient permanente.

Pourtant la réflexion écrite régulière est une perspective à laquelle je ne veux pas renoncer.

C'est un besoin de tout homme que la pause, plutôt quotidienne et vespérale, qui met entre parenthèse l'action pour essayer de considérer les événements en perspective, et clarifier le sens de ce qu'on a fait et de ce que l'on a à faire. Et c'est une condition liée à l'activisme fébrile du monde contemporain que de ne laisser que les vacances d'été pour une telle pause.

Mais il faut résister au courant. Être libre, n'est-ce pas d'abord maîtriser son temps ? Inscrire son propre rythme de vie dans le monde ?

Mais, après tout, pourquoi ne pas faire un simple examen de conscience – tout intérieur à soi – à la manière des Stoïciens ?

Il s'agit ici de penser notre humanité dans sa résonance avec l'actualité. Or la pensée philosophique fait fond sur l'universalité de la condition humaine.

Hommage à Internet et à ce blog de donner une possibilité de concrétisation de cette universalité : en écrivant ici ce qui me soutient et ce que je vise (sans peut-être toujours l'atteindre) c'est vous qui vivez les mêmes problèmes de l'humaine condition.