mercredi, août 01, 2007

Le dopage et ses paradoxes

"Que ce soit une chose étrange et surprenante de dire que c'est une sottise de chercher les grandeurs, cela est admirable !" Pascal, Pensées.


Concernant le dopage des sportifs, et le plus manifestement, ceux du Tour de France, il est intéressant de noter quelques paradoxes sanitaires.

En se dopant, les sportifs prennent des susbstances ayant pour fonction de modifier des métabolismes (les équilibres) dans leur organisme qui fonctionne correctement. Ils donnent des médicaments à leur corps en pleine santé. Premier paradoxe.

Ils réalisent ainsi un imaginaire d'identité glorieuse. Ils se préparent aussi des lendemains qui déchantent, comme tous ceux dont la valeur sociale dépend de l'attention médiatique. Mais bon ! On peut admettre que cela puisse être cohérent pour certains . Qui a la réponse définitivement assurée du sens de la vie pour leur faire la leçon ? Quoique j'aime bien le discours de Christophe Bassons qui veut trouver dans le cyclisme de haut niveau, non la gloire, mais un épanouissement de ses qualités personnelles.

Mais le paradoxe gît un peu plus loin, puisque ces sportifs veulent ainsi réaliser un idéal d'homme et s'ériger en modèle – la vertu comme effort sur soi, comme capacité de la volonté à dominer la souffrance – qui est au fond un modèle de liberté ; alors que, secrètement, ils se font esclaves de médecins-gourous, de filières clandestines, et de techniques qui les instrumentalisent. Ce paradoxe se dénoue au moment où le sportif se fait prendre et passe en un instant de celui qu'on louangeait à l'infini au justiciable dont on se détourne.

Pourtant il faut considérer le phénomène du dopage sportif plus largement. Combien est symptomatique la soudaine énurésie verbale sur le dopage, de journalistes qui, si peu de temps auparavant, se retenaient consciencieusement d'en parler, alors même qu'il était flagrant qu'une information honnête l'aurait requis ! Le paradoxe est ici que, si le sportif se soigne alors qu'il n'est pas malade, la société – plus précisément l'investissement des valeurs dans la société – est malade mais ne se soigne pas. Pas de diagnostic même ! Tout se passe comme s'il était normal d'avoir mise en valeur aussi longtemps et aussi massivement la valeur intinsèque des sportifs, dans les compétitions, alors que l'on ne pouvait que savoir qu'il n'en n'était rien.

Finalement le vrai paradoxe c'est que le dopage dont on parle enfin, le dopage des sportifs – le petit dopage – n'est à ce point matière à prolixité, que dans la mesure où il permet de taire le grand dopage de la société.

Le vrai dopage, en effet, ne serait-il pas celui de toute une société qui se "shoote" à l'imaginaire d'épopées sportives pour recouvrir l'insuffisance des existences de ceux qui la constituent ?

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