mercredi, octobre 02, 2024

À propos du terrorisme



Notre époque est bien singulière, et d’une singularité inquiétante. Comment peut-on méconnaitre à ce point cette vérité toute simple ?
On ne combat pas le terrorisme en semant la terreur !
On fait tout le contraire ! On le démultiplie !
Car qu’est-ce que le terrorisme ? Le comportement violent qui vise à défaire une vie sociale en semant la terreur.
Il faut avoir connu la terreur pour être terroriste. Mais il y a une autre condition : c’est l’imbécilité ! Soit le défaut de réflexion sur le bien que l’on vise lorsque son comportement est dans la simple réaction de faire mal à qui l’on juge responsable de ce qui nous a fait mal.
Car le terrorisme est toujours une forme de vengeance. Et dans la vengeance on croit réparer, autrement dit se réhabiliter d’une offense subie, en portant un dommage réciproque. Mais, comme l’explique Hegel, « la vengeance n'a pas la forme du droit, mais celle de l'arbitraire, car la partie lésée agit toujours par sentiment ou selon un mobile subjectif. Aussi bien le droit qui prend la forme de la vengeance constituant à son tour une nouvelle offense, n'est senti que comme conduite individuelle et provoque, inexpiablement, à l'infini, de nouvelles vengeances. »[1]
La vengeance parce qu’elle procède du sentiment de celui qui se venge ne calcule pas son agression à la mesure de la responsabilité de qui elle vise. Ou plutôt le seul calcul toujours implicite dans la vengeance est d’en faire trop plutôt que pas assez. Parce que le « pas assez » laisserait l’avantage symbolique à l’offenseur. On est, en effet, dans une forme négative d’échange symbolique dans le cycle des vengeances : on agresse en sorte que l’acte de vengeance signifie, à ses propres yeux et aux yeux de tous, la réhabilitation de l’offensé en ce qu’il se fait voir offenseur.
C’est pourquoi la vengeance tend à engendrer une vengeance en retour, et ainsi « inexpiablement, à l’infini » et sur un degré de violence croissant.
Le terrorisme est le point extrême qu’atteint la violence vengeresse, celle qui vise à produire la terreur, c’est-à-dire la perte de ce minimum de confiance en l’humain qui rend possible la vie sociale.
Alors, s’il n’y a pas des âmes secourables qui aident le terrorisé à retrouver confiance, la seule socialité qui se reconstituera sera par réaction vengeresse pour commettre des actes de terreur.
Non, on ne combat pas le terrorisme en semant la terreur, c’est tout le contraire : on crée des motifs de terrorisme pour les décennies à venir …
 
 
 

[1] Georg W. F. Hegel, Propédeutique philosophique (1809), trad. M. de Gandillac, Éditions de Minuit.